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 C'était il y a 80 ans... le 18 Juin 1940 :

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(Voir texte intégral en fin d'article).

(Photo DD 12498  n° Img 182) 

 

Refusant l'idée même d'un armistice, le  sous-secrétaire à la Guerre, de Gaulle, va,

par l'appel fameux du 18 juin sur les ondes,

tenter de rassembler les éléments d'une force de résistance à l'invasion allemande.

 

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Jeunes, très jeunes ceux qui ont rejoint la France libre,

en Juin 1940 à Londres, avec De Gaulle.

(Photo x DD 12564  n° Img 563)

 

Ils ne sont pas nombreux ceux qui rejoignent la France libre en juin 1940.

Sur les cinquante mille hommes présents en Angleterre, mille deux cents restent avec le général de Gaulle,

dans les premiers temps, dont deux cents sur les deux mille blessés hospitalisés. 

 

L’appel qui a changé la vie du Général de Gaulle. 

Récit du journal "La Voix du Nord" du 13 Juin 2010.

Archives Documents Photos : Daniel Delafosse.    

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Le 17 juin 1940, le général de Gaulle,

escorté du lieutenant de Courcel,

quitte Bordeaux pour Londres.

(Photo X DD 12494  n° Img 169)

Il est parti comme un filou. Au nez et à la barbe des autorités françaises, qui venaient de s'installer à Bordeaux. Officiellement, en ce petit matin de juin, il raccompagnait à l'aéroport son ami Edward Spears, l'officier de liaison de Churchill. Mais il est monté dans l'avion, accompagné du seul Geoffroy de Courcel, son aide de camp.

 

À Londres, le général de Gaulle a rendez-vous avec son destin et la France avec sa liberté. Il en est sûr, totalement convaincu de ce qu'il a à faire. Mais à cet instant, il n'est pas loin d'être le seul.

Maintenant il est silencieux et pensif, engoncé dans son siège et regardant - déjà - la France de haut. Nous sommes le 17 juin et le général Charles de Gaulle, sous-secrétaire d'État à la Guerre, aura bientôt 50 ans.  Ses pensées sont à ce qu'il dira dans l'après-midi à Winston Churchill, qui vient de s'installer au 10 Downing street.

« Nous arrivâmes à Londres à midi, raconte Geoffroy de Courcel. Après un rapide déjeuner avec le général Spears au Royal Automobile Club, le général s'installa dans un studio de Seymour Place, qui lui avait été prêté par Jean Laurent, directeur civil de son cabinet. L'après-midi, il rencontra aussitôt Churchill pour lui exposer ses intentions. » 

 

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Winston Churchill en 1940.

(Photo X DD12493  n° Img 159)

Les deux hommes se connaissaient à peine - trois ou quatre rencontres -, mais leurs deux caractères se sont reconnus. C'est en apprenant que Pétain vient d'accepter l'armistice que Churchill lui propose de s'exprimer sur les ondes de la BBC, en fin d'après-midi. Mais ce n'est pas si simple : il doit en parler devant le Parlement, convaincre le cabinet de guerre. Après tout, ce De Gaulle est presque un inconnu et le gouvernement français le renie, depuis sa fuite.

Qu'importe. De Gaulle et son aide de camp rentrent à Seymour Place, après avoir dîné chez Jean Monnet, président du comité de coordination franco-britannique. Une soirée tendue. La détermination de De Gaulle, la virulence de ses propos sur le maréchal Pétain (« C'est un traître ») mettent les convives mal à l'aise.

Au matin du 18, dans le petit appartement, le général rédige. Il sait que l'enregistrement est pour ce soir, il a confiance en Churchill. A-t-il le choix, d'ailleurs ? 

 

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Manuscrit original de l'appel du 18 Juin 1940.

(Photo x DD 12492  n° Img 144)

 

Cinq versions...

 

« Il passa la majeure partie de la journée à rédiger son appel, écrivant, raturant, recommençant, s'interrompant de temps à autre pour fumer une cigarette ou pour exposer, pensant tout haut devant moi, comment il voyait l'avenir de la guerre après l'effondrement de la France et la décision britannique de poursuivre le combat. » Geoffroy de Courcel est l'unique témoin des souffrances du général, qui rédige au moins cinq versions différentes de son texte.

C'est que les Britanniques sont ennuyés, au fond. C'est vrai, Churchill a besoin de ce militaire qui dira que la France continue le combat au côté de l'armée de Sa Gracieuse Majesté, mais ses mots sur Pétain sont durs.

Alors, il édulcore. En début d'après-midi, après que les deux hommes ont pris un repas avec Duff Cooper, le ministre britannique de l'Information, c'est Elisabeth de Miribel, une amie de Geoffroy de Courcel, qui tapera le texte final.    

 

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Elisabeth de Miribel, la secrétaire bénévole du général,

devant la machine avec laquelle elle a tapé le manuscrit de l'Appel du 18 juin.

Elle est parmi les toutes premières Françaises à porter la croix de Lorraine. 

(Photo X DD 12561  n° Img 623)  

 

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Les premiers tampons de caoutchouc de la France Libre

 ne portent pas encore la croix de Lorraine.

 Chargée d'en acheter un pour marquer de son sceau les lettres du général,

Mlle de Miribel n'a rien trouvé de mieux qu'une étoile de mer.

(Photo X DD 12562  n° Img 624)

 

« Je me suis retrouvée devant une machine à écrire, alors que je tapais fort mal, et devant des feuilles manuscrites très difficiles à déchiffrer. J'étais installée dans une chambre, à côté de la salle à manger. Mon travail a commencé vers trois heures.

Je m'applique laborieusement à lire un texte finement écrit et surchargé de ratures. Je dois le recopier, au propre, à la machine. Pour gagner du temps, Geoffroy de Courcel m'en dicte des passages. Il emporte, au fur et à mesure, les feuillets dactylographiés pour les soumettre au général. » 

En fin d'après-midi, ce dernier glisse les trois feuillets dactylographiés dans la poche de son uniforme et s'engouffre dans le taxi qui doit le conduire à Portland place, au siège de la BBC.  

 

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 De Gaulle à Londres, en 1940,

entre son domicile et le siège de la France libre. 

(Photo x DD 12563  n° Img 622)

 

À Broadcasting House, c'est soudain l'effervescence. L'état-major vient de prévenir qu'un général français doit enregistrer un message à destination de la France. On n'est pas trop sûr de son nom, mais il faut le recevoir avec les honneurs : il est envoyé par Churchill lui-même. Le directeur étant absent, c'est Sir Stephen Talence, directeur adjoint, qui le reçoit. Gants blancs, képi à feuilles de chêne, le grand général en impose. 

« Très calme, mais assez tendu ». 

Elisabeth Barker, la secrétaire qui accompagne Sir Talence, note « ses yeux sans sourire ». C'est elle qui l'emmène au studio 4C, où Gibson Parker, le speaker de permanence, termine la lecture du bulletin des nouvelles. Pendant une interruption, il demande un essai de voix au général. Celui-ci lance d'une voix claire : « La France. » Il est dix-huit heures. Maurice Thierry, le speaker français, s'est éclipsé après avoir salué fiévreusement De Gaulle, qui l'a à peine vu.

 

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 (Photo x DD 12560  n° Img 631)

 

Ci-dessusl'une des photographies dites de l'Appel du 18 juin.

Nous savons qu'il n'en est rien :

aucune photographie et aucun enregistrement ne furent faits ce jour-là.

De quand date le document ? de 1940 ? On le dit, mais sans certitude. 

 

Il est seul au micro. « Il paraissait très calme, mais assez tendu, a dit Elisabeth Barker. Il ne voyait absolument rien autour de lui. Je suis sûre qu'il ne distinguait personne dans le studio, rien que le micro qu'il regardait fixement, comme s'il voyait au-delà de l'appareil. » En deux minutes, c'est dans la boîte. De Gaulle l'a dit : « Quoi qu'il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas. »

L'appel historique sera finalement diffusé quatre heures plus tard.  

 

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Cette affiche largement diffusée n'est pas l'appel.

Elle sera placardée sur les murs de Londres

un mois plus tard.

(Photo DD 12565  n° Img 550) 

 

Le texte intégral avalisé par De Gaulle.

 

Dans la précipitation, personne n'a songé à conserver l'enregistrement fait le 18 juin à dix-huit heures. Le général a lui-même avalisé ensuite le texte intégral, qui a maintes fois été confondu avec l'affiche largement diffusée à Londres dès les jours suivants. ... 

« Les chefs qui, depuis de nombreuses années, sont à la tête de l'armée française, ont formé un gouvernement.

 Ce gouvernement, alléguant la défaite de nos armées, s'est mis en rapport avec l'ennemi pour cesser le combat.

 Certes, nous avons été, nous sommes submergés par la force mécanique, terrestre et aérienne, de l'ennemi.

 Infiniment plus que leur nombre, ce sont les chars, les avions, la tactique des Allemands qui nous font reculer. Ce sont les chars, les avions, la tactique des Allemands qui ont surpris nos chefs au point de les amener là où ils en sont aujourd'hui 

Mais le dernier mot est-il dit ? L'espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ?

Non ! Croyez-moi, moi qui vous parle en connaissance de cause et vous dis que rien n'est perdu pour la France. Les mêmes moyens qui nous ont vaincus peuvent faire venir un jour la victoire.

Car la France n'est pas seule. Elle n'est pas seule. Elle a un vaste empire derrière elle. Elle peut faire bloc avec l'empire britannique qui tient la mer et continue la lutte. Elle peut, comme l'Angleterre, utiliser sans limite l'immense industrie des États-Unis. 

Cette guerre n'est pas limitée au territoire malheureux de notre pays. Cette guerre n'est pas tranchée par la bataille de France. Cette guerre est une guerre mondiale. Toutes les fautes, tous les retards, toutes les souffrances n'empêchent pas qu'il y a, dans l'univers, tous les moyens nécessaires pour écraser un jour nos ennemis. Foudroyés aujourd'hui par la force mécanique, nous pourrons vaincre dans l'avenir par une force mécanique supérieure. Le destin du monde est là. 

Moi, général de Gaulle, actuellement à Londres, j'invite les officiers et les soldats français qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s'y trouver, avec leurs armes ou sans leurs armes, j'invite les ingénieurs et les ouvriers spécialistes des industries d'armement qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s'y trouver à se mettre en rapport avec moi. 

Quoi qu'il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas. 

Demain, comme aujourd'hui, je parlerai à la radio de Londres. »

 

Commentaire sur Facebook : 

Marie Vanelslande Journee historique Merci pour ce beau reportage

 

Voir aussi... Cliquez ci-dessous : 

Le Nord de la France en Juin 1940.

Londres en 2010 (Sur les traces de Juin 1940).

De Gaulle en Juin 1940 (La Croix de Lorraine... ses prémices).

Londres, en Juillet 1940 (Les futures Forces françaises libres).

Visite de Maurice Schumann après la Libération d'Halluin (Appel du 18 juin 1940 - 18 Juin 2012) 

Maurice Schumann à Halluin en 1988 (Débarquement 1944 - Sépulture 1998). 

Maurice Schumann 1911 - 1998 (Les grandes étapes de sa vie).

Visite de Maurice Schumann après la Libération d'Halluin (50ème anniversaire de la Libération en 1994). 

Congrès Eucharistique de 1952 (Charles de Gaulle ce Lillois... Rétrospective).

 

18/6/2012 - 17/6/2020

Commentaire et Photos : Archives Documentation - Daniel Delafosse